La Credenza

La cuisine de Giovanni Grasso est avant tout extrêmement noble. Le recours à des produits célestes, généreusement proposés, est plus que garanti. Des matières premières qui font l’objet d’une méthodologie irréprochable et sont cuites à leur juste point afin de mettre en relief toutes leurs qualités intrinsèques. À partir de là, le chef dicte son message à deux niveaux : des constructions traditionnelles réinterprétées ou réinventées, et des articulations judicieusement originales, voire audacieuses. Ici, on joue donc carte sur table en faveur de la modernité et de la personnalité, dans une plus grande ou une moindre mesure, selon les propositions.
La salade d’asperges vertes crues en lamelles accompagnées de pousses, germes et jus de carotte est d’une naturalité, d’une délicatesse, d’une légèreté et d’une fraîcheur inénarrables, synonymes d’intelligence et de simplicité. Plus doctorale et plus académique, bien que pourvue de contraste, la caille désossée cuite dans de l’huile d’olive à basse température est disposée sur des tranches de pomme verte à la plancha et flanquée d’une salade ; un mets très charnel, très technique et très bien fini. Vient ensuite une curieuse manière de concevoir un « mer et montagne » : un consommé expressif de crustacés dans lequel baignent des raviolis traditionnels intercalés farcis de poulet fumé et des sphères gélatinisées de pommes vertes et de gamba rouge. Le risotto mantecato aux huîtres servi avec des dés de gélatine élaborée à base d’un bouillon végétal fumé rehaussé au soja est une proposition controversée en raison de son caractère irrévérencieux, dans la mesure où le fruit de mer disparaît, laissant le meilleur de lui-même au riz ; très spécial. Les raviolis liquides de pigeon, disposés sur des traits de betterave avec une poudre de beurre glacée, s’avèrent talentueux, explosifs et énormément savoureux. Un autre risotto mantecato est présenté recouvert d’un carpaccio de veau « cuit » à la chaleur du riz. Les agnolotti farcis de salami de vache de Turgia – ni plus ni moins –, conventionnels, on ne peut plus gourmands, sont accompagnés d’une crème de pomme de terre rassasiante. L’agneau est éminent : saveur intense, texture onctueuse, point de cuisson bien rose et compléments séduisants (légère marinade au café, lit doux et crémeux de ragoût de maïs, décor d’une salade d’herbes aromatiques). Les desserts sont en parfaite harmonie avec le reste. Citons par exemple la mousse de chocolat assortie d’une crème brûlée à l’orange et d’une sphérification de l’agrume. Ou encore le bavarois à la banane proposé avec un granité de café et une mousse à l’amande ; des saveurs de toujours mises au goût exquis du jou