Saveurs Marines de premier choix
Lorsque l’on parle de fruits de mer au goût de mer, on hésite toujours entre les huîtres et les pouce-pieds, admirées par les grandioses clovisses de Carril, dont la variété des géantes mérite également de vives acclamations. Mais la question, en fait, c’est qu’on oublie presque toujours deux éminentes espèces sauvages très typiques des côtes andalouses qui, en raison de leur abondance, de leur prix modique et de leur enracinement populaire, se trouvent encore facilement aux criées des ports. Nous nous référons aux praires et aux anémones de mer.
Les premiers, qui se mangent crus en raison de leur goût primaire de mer, sont connus sous des dénominations très diverses en fonction de l’endroit où ils sont pêchés : praires (bolos ou piedras) à Malaga, Almeria et Granada, vénus (escopiñas grabadas) sur le reste de la côte méditerranéenne et carneiros ou carneirolos en Galice et en Italie; bref, une véritable tour de Babel pour se référer à un mollusque dont le nom scientifique est Venus verrucosa et dont il existe au moins deux sous-espèces différentes : la commune et la rose. Cet animal, qui vit enterré dans les fonds sableux et limoneux des eaux peu profondes et des grandes profondeurs, possède une coquille presque circulaire, bordée de nettes crêtes laminaires parallèles, avec des nœuds verruqueux. Du point de vue gastronomique, les praires ou vénus, qui peuvent parfois être comparés aux grandes palourdes de Carril en raison de leur taille, sont réellement exquis, surtout si les chefs prennent le temps de retirer tous les résidus de sable de leur estomac en les conservant assez longtemps dans de l’eau de mer. Des chairs fermes, élastiques, lisses, très juteuses aux puissantes essences de mer. Impensables de les cuisiner : ils doivent être mangés crus.
Un établissement qui dispose toujours de praires d’une fraîcheur absolument garantie est le restaurant La Dorada de Málaga (c/ Emilio Díaz, 46 - Ciudad Jardín - Tél. : +34 952257954; fermé le dimanche soir, le lundi et au mois d’août; réservation exigée). Ceux du restaurant Cucas (c/ Barlovento, 1 - Torrenueva, Motril, Grenade - Tél. : +34 958835638; fermé le lundi ; réservation exigée) sont également vivement recommandés.
Les anémones de mer constituent également un produit qui, abondant et magnifiquement savoureux, est en train de se répandre en tant que véritable délice sur toutes les côtes andalouses et dans certains restaurants de haute cuisine. Nées sous forme d’aliment frit pendant la pénurie de l’après-guerre espagnole dans la baie de Cadix, un endroit qui a toujours su transformer le besoin en vertu, ces cœlentérés appartenant à l’espèce Anemona sulcata (la seule anémone présente dans la Méditerranée qui, vivante, a une très grande capacité urticante) sont notamment nombreux aux pieds des falaises proches du détroit de Gibraltar ainsi que sur les côtes de Malaga et de Grenade, à des profondeurs côtières oscillant entre 10 et 15 mètres.
De couleurs vert-violet rutilantes au sortir des filets, les anémones de mer perdent nettement en apparence, texture et saveur après quelques heures au réfrigérateur. D’où la difficulté de les diffuser au-delà des restaurants et bars de la côte et la grande différence qui existe entre le produit frais et emballé sous-vide. Les anémones sont généralement frites, en vue d’obtenir un contraste entre leurs tentacules extérieurs croquants et leur intérieur gélatineux, succulent et regorgeant d’exquisité marine. En fait, les gastronomes l’appellent populairement cervelle de mer ! Quant à la manière de les frire, il existe deux procédés qui varient quelque peu en fonction de l’aspect gastronomique que l’on souhaite mettre en relief. Si l’on recherche une touche croquante, on frira les anémones à 180º C après les avoir passées directement dans la farine de pâtisserie. Si on souhaite plutôt préserver au maximum le côté crémeux de l’intérieur pour rehausser le goût iodique de mer, on farinera deux heures plus tôt, puis on laissera au congélateur afin que la chaleur de l’huile pénètre plus lentement et que l’on obtienne une texture croquante à l’extérieur et fluide à l’intérieur ; une préparation qui a reçu la dénomination de dessert d’anémones "coulant".
Les meilleures anémones frites se dégustent évidemment en Andalousie, principalement sous forme de tapas. Les meilleures sont servies au Casablanca, à Séville (Zaragoza 50, Tél. : +34 954224698, fermé le dimanche et au mois d’août, réservation exigée pour manger dans le salon), à El Espigón I, également à Séville (Bogotá 1, Tél. : +34 954239256, fermé le dimanche), à El Campero, à Barbate, Cadix (Avda. de la Constitución, local 5 C, Tél. : +34 956432300, fermé le mardi d’octobre à janvier uniquement) ainsi que, sous forme de "coulant", au FM, à Grenade (Ctra. de Jaén 54, Tél. : +34 958157004, fermé le lundi, juillet et août), le véritable temple de la matière première.