Bens d´Avall

Dès la prise de possession de la table, sur la terrasse, de laquelle on peut contempler une magnifie vue panoramique et relaxante sur la Méditerranée (réserver à côté de la balustrade), Benito Vicens reçoit ses clients et les plonge dans le paysage gastronomique espagnol : Notre « pa amb oli » surprise ; un jeu orchestré par le pain et les olives. Nous sommes donc indubitablement en présence d'une cuisine profondément enracinée dans la tradition espagnole au clair accent majorquin. C’est que nous avons affaire avec le représentant le plus authentique de la haute cuisine baléare ; un style qu’il interprète avec une grande personnalité et vient renforcer l’étoffe et le charme de ses plats. Il recrée des goûts et des recettes conventionnelles avec une touche de vocation moderne et de pragmatisme évidente. Évolution modérée destinée à un public cosmopolite aux palais ouverts.

Ici, toute la carte change chaque année, à l’exception d’un classique de la maison, qui n’est qu’accessoirement modifié : le carpaccio de gambas rouges de Soller avec salade de roquette, scarole, germes et pignons assorti de pesto maison au basilic, eau de mer gélatinisée et lamelles de vieux fromage de Majorque, aujourd’hui transformé en une majestueuse salade intégrale regorgeant de fraîcheur et de complexité qui conserve toute la pureté des éléments, y comprises les délicieuses gambas fraîches, aplaties et coupées en lamelles (non congelées). Les gambas rouges, coryphènes, rougets, rascasses, langoustes, agneaux, cochons de lait… laissent libre cours à une imagination toujours pondérée et riche en nuances. À ne pas manquer, idéalement, en plus du mets précité, les prodigieuses soupes majorquines – mies de pain sèches imprégnées d’une profonde saveur de mer – avec légumes crus et cuits, pickles de fenouil marin, terrine anthologique de pintade et médaillons et pinces de langouste, parfaite ; une folie gastronomique qui a tout pour elle, voire davantage. Autres délices à ne pas manquer : les huîtres au punzu – savoureux bouillon de thon fumé – et granité au Chablis blanc ; l’agneau rôti aux arômes champêtres, couscous au céleri-rave et poires, gnocchis coulants au lait de brebis, jus épicé et pieds bleus. Inutile de dire que le chef prend à cœur chacune de ses constructions. Le convive aura du mal à se décider entre ce dernier mets ou le petit cochon de lait, croquant et onctueux, parfumé à l’orange et au genévrier, orné d’une pomme au poivre rose et de salsifis al dente, le tout bercé dans une réduction de son jus.