La région des Abruzzes est une terre qui regorge de générosité. Les gourmets le remarquons chaque fois que nous rendons visite à un restaurant. Un sentiment que nous percevons avec d’autant plus d’intensité lorsque nous prenons place à la table de L’Angolo d’Abruzzo, chez Valerio Centofanti.
Beaucoup de choses ont changé depuis notre dernière visite, au printemps 2008. Aujourd’hui, en 2011, Valerio (31 ans), propose une cuisine beaucoup plus précise et définie, qui a évolué en termes de maturité. Il présente des élaborations plus fines et moins rustiques, mais qui conservent la sincérité typique de la cuisine et des habitants des Abruzzes.
Dès notre arrivée, nous sommes accueillis par la jeune et ravissante Valentine, la sœur de Valerio. Au fond de la salle à manger se trouve le grand feu ouvert avec le gril et les braises, orchestrés par Lanfranco, le père, qui porte l’inscription « braciere » (rôtisseur) sur sa veste, juste sous son nom. Mais nous l’appelons « Maître rôtisseur », en français ! La présence de Lanfranco suppose une grande plus-value, car il jouit d’une longue expérience et d’une grande culture gastronomique. La cave, c’est son affaire : il préfère les grandes bouteilles des Abruzzes à la profondeur des grands crus. Bien que nous n’ayons pas eu la chance de faire la connaissance de son épouse, la mère de Valerio et de Valentina, nous savons qu’elle est là en permanence et qu’elle bénit tous les plats avant qu’ils ne quittent la cuisine.
Une fois attablés, une petite dégustation des charcuteries locales, toutes délicieuses, s’impose. En guise d’accompagnement, plusieurs sortes de pain faits maison avec de la levure mère : blanc, aux olives, au lard, sous forme de délicieux bâtonnets, … Si vous passez à L’Angolo d’Abruzzo à l’époque des champignons, goûtez les cèpes coupés en deux, placés quelques minutes sur les braises et assaisonnés d’ail, de persil, de sel et d’huile ; un délice. La salade d’amanites des césars avec céleri en julienne et un filet d’huile est tout aussi exquise ; outre la qualité des produits, le convive appréciera la délicatesse avec laquelle l’assaisonnement a été réalisé. La grandeur des matières premières est de nouveau présente au sein de la bruschetta à la truffe noire avec huile d’olive et cèpes.
La technique de Valerio apparaît dès les entrées. Ne vous en allez pas sans avoir goûté les raviolis farcis au yaourt de brebis servis avec un accompagnement plutôt singulier : thon au lapin, légumes croustillants et pecorino râpé ; un mets savoureux, d’une consistance différente, parfumé, où l’acidité du yaourt et le goût du pecorino s’avèrent très bien équilibrés. Les macaronis alla gricia (vendu à la boutique spécialisée Benedetto Cavalieri, voir section Produits du site) sont cuits à la poêle avec du bouillon végétal, comme un risotto, et raffinés avec du lard, une brunoise de chardons, du poivre noir et du pecorino. Quelle personnalité ! Quelle cuisson al dente ! Cette année, je ne me souviens pas avoir mangé un plat de pâtes aussi émouvant et délicieux. Filet de morue, tomate et eau de tomate. Nous retrouvons une matière première de premier choix, exaltée par l’intelligence du chef. Le poisson est cuit sous vide à basse température et servi en compagnie des tomates confites au four, de tomates Datterini pelées et poêlées, d’olives Taggiasche et d’eau de tomate. La morue s’exprime dans toute sa pureté, tout comme les tomates, d’une qualité proverbiale, cuites à part, séparées du poisson.
Les viandes et les grillades ne sont pas mal non plus, non seulement le steak et l’entrecôte, mais aussi l’agneau typique des Abruzzes, les saucisses, la Scamorza (fromage fumé au lait de vache), las anchois,… Pour notre part, nous avons opté pour l’agneau farci aux œufs et au fromage sur crème de pois (délicieuse) servi avec des fleurs de courgette (tout aussi délicieuses) farcies aux anchois et à la Scamorza frits.
Les desserts sont synonymes d’éminence. La mousse au ricotta sur coulis de griottes, griottes et biscuit aux amandes en poudre est à se lécher les babines. La crème caramel au safran de Navelli et caramel à l’orange est grandiose : consistance du flan parfaite (grâce à la qualité des œufs) et grand équilibre entre l’onctuosité, le caramel et l’arôme incommensurable de cette variété de safran.
Les plats reflètent bien la ferme volonté de travailler, de se perfectionner et, surtout, la conviction d’utiliser d’excellentes matières premières avec intelligence.