Un espace architectural fascinant. Une cuite de rêve. Rien que pour savourer l’œuvre de Frank Gehry, la visite à Marqués de Riscal vaut le détour. Mais il y a évidemment bien plus que cela. Une cave, la plus ancienne d’appellation d’A.O.C. Rioja, qui semble avoir été remodelée totalement pour pouvoir accueillir un projet hôtelier de rêve – brillante idée – comprenant un palace 5 étoiles et un restaurant de très grand luxe doté d’un service irréprochable. Si tous ces éléments marquent la différence, la cuisine, réellement gastronomique, n’est pas en reste. Francis Paniego a en effet su transférer la philosophie du Portal del Echaurren et la concrétiser avec rigueur et efficacité. Son équipe, emmenée par le jeune chef José Ramón Piñeiro, un nom bien présent d’un avenir imprévisible, est pratiquement parvenue à ce qu’on y mange aussi bien qu’à Ezcaray. Et à ce que le convive puisse se délecter aussi bien à travers les plats traditionnels régionaux que par le biais des propositions plus solennelles à vocation contemporaine et cosmopolite. Ensemble, les deux styles façonnent une carte ouverte à tous les palais, à diverses aptitudes, conformément à ce projet d’une vocation et d’une ambition universelles.
Une journée à Marqués de Riscal est une expérience que je recommande vivement à tous les passionnés de vin et de gastronomie. À tous ceux qui aiment la vie. Pour 10€, on vous propose une visite des caves avec une dégustation de deux vins. Après cela, vous pouvez poursuivre votre mouvement de coude, savourer des tapas au bar, manger au restaurant traditionnel pour 40€, ou vous sentir comme un marquis au restaurant gastronomique en dégustant un Baron de Chirel 04 – le meilleur Chirel qu’a élaboré mon cher Paco Hurtado de Amezaga –, ou un Frank Gehry 05 – probablement le vin le plus éminent que cette entreprise historique ait concocté depuis sa fondation en 1860. Comme nous l’avons dit, répétons, réitérons et confirmons : la cave a été remodelée, avec tout ce que cela implique.
Francis Paniego et José Ramón Piñeiro sont parvenus à matérialiser 90% des plats que ma tendre Marisa a su déifier dans son restaurant populaire, El Portal del Echaurren. Ses croquettes de jambon, que la béchamel, raffinée, et le panage, extrafin, situent parmi les meilleures du monde. Ses caparrones aux sacrements, qui élèvent la fève rouge au sommet des grands ragoûts. Sa macédoine de légumes, dont chaque composante, regorgeant de pureté, est soumise à une réduction substantielle des points de cuisson – Chapeau ! Et sa marmite de pieds d’agneau, très généreuse en gélatine et en sauce, qui invite à la gourmandise.
Et ce n’est pas tout. Il y a aussi les plats réinventés par Francis, comme le colin à la romaine, cuit à 45 ºC, servi sur des poivrons rôtis et une soupe au riz qui réaffirment la minutie de ses disciples. De même que les coquilles Saint-Jacques, monumentales, géantes, assorties d’une purée de chou-fleur et d’une brunoise de poivron et ananas. Ou encore la langoustine, colossale, déposée sur des pommes de terre à la vanille accompagnées d’une mayonnaise au safran. Et que dire du yaourt au fromage Idiazabal et compote de tomate, une construction qui vient confirmer les dons du jeune chef, synonymes de cuisine personnelle captivante.