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Michel Bras


Gargouillou de verduras
Michel Bras
Pays: France
Localité: 12210 Laguiole
Adresse: Route de l’Aubrac
(+33) 0 565511820
Jours de fermeture: Le mardi et mercredi midi (sauf en juillet et août), le lundi, de novembre à mars
Prix à la carte: 100/140 €
Prix menu de dégustation: 95, 152 €


Au début des années quatre-vingts, la restauration française était en pleine effervescence. C’était l’époque glorieuse, pour certains plus que d’autres, de Girardet, Chapel, Maximin, Vergé, Robuchon, Senderens, Bocuse, Guérard et compagnie. Alain Ducasse peaufinait sont style néoclassique à Juan-les-Pins, Pierre Gagnaire se consacrait à l’expérimentation pure et dure dans un ancien studio de photo de St Étienne, Marc Veyrat définissait sa ligne personnelle à Annecy… et c’est dans ce contexte que la renommée de Michel Bras, jeune chef autodidacte de Laguiole, un village minuscule du cœur de la France, a commencé à s’étendre sans limite. Par le biais de la soustraction, Bras a créé un style qui a changé le cours de la cuisine contemporaine. Peu d'éléments différents dans l'assiette, utilisation d'herbes autochtones fraîchement cueillies, abolition des crèmes et sauces, netteté, minimalisme, sensibilité, rigueur, respect absolu du caractère saisonnier des produits, amour profond des racines. Une cuisine du terroir ? Non, à moins que les homards et les loups de mer ne fréquentent les prairies de l'Aveyron ! Michel Bras va plus loin, sa cuisine est plutôt une cuisine philosophique intellectuellement influencée par l’Aubrac, une région vierge et sauvage où le contact avec la nature est inévitable. Son génie et sa passion spontanée pour tout ce qui est bon, beau et authentique ont fait le reste. Le “style Michel Bras”, qui a influencé des dizaines de cuisiniers de la dernière fournée, a été adopté sans égards par son fils Sébastien, co-titulaire de la cuisine, qui, sous la tutelle de son père, a assumé la lourde tâche de faire évoluer sa philosophie. Les résultats de cette collaboration s’avèrent prometteurs... Nous avons commencé par un canapé soyeux aux champignons, trois délicieuses cuillerée de rouget aux épinards, de poivron aux céréales et de ris d'agneau à la moutarde. Ensuite, nous avons succombé à la tentation de demander le grand classique : le gargouillou aux légumes. Ici, il s’agit d’un véritable phénomène surnaturel, car la transformation d’un simple plat de légumes bouillis en un chef-d’œuvre est une prouesse irréalisable sans l’intervention d’une énorme dose de magie. Et de la magie, il y en a ! Nous sommes ensuite passés à une ventrèche de Saint-Jean-de-Luz avec une vinaigrette de figues noires, pousses, fromage blanc et petites feuilles anisées ; moins magique que le gargouillou, mais tout aussi irréprochable. Nous avons poursuivi avec du ris et du filet d'agneau local poêlés avec des fruits secs, des haricots coco, de l’oseille de Guinée, de la poudre de zeste d'orange et de l'huile au serpolet ; un met d’une grande précision, succulent. Pour terminer, une extraordinaire anguille de la Loire glacée avec un jus très liquide aux arômes doux légèrement fumés, accompagnée d‘artichauts violets et d’une julienne de radis et de feuilles de chénopode blanc. Grandiose. À l’heure des desserts, après avoir dégusté un aligot, nous n’avons pu résister au Coulant au chocolat®. Après la pêche Melba d’Escoffier, le coulant est sans doute le dessert le plus plagié du monde. Si Michel Bras empochait un euro par copie non-autorisée, il serait multi-plurimillionnaire. Et, croyez-moi, il le mériterait. Lorsqu'un restaurant se trouve à un endroit aussi reculé, il est logique de se demander si « le voyage en vaut la peine ». Oui, incontestablement